Est-ce vraiment urgent ? Comment baisser la pression ?

Tant d'urgences et d'exigences ! Téléphone, messages, travail, trafic, finances, publicités, infos inquiétantes… que de pression. Et nos pressions internes… tous les « tu dois », « je dois » qui viennent de nous. Je dois faire ça aujourd'hui ou mon patron va se fâcher. Je ne dois pas avoir l'air d’aller mal. Je ne peux pas quitter la maison avec de la vaisselle dans l'évier. Une sous-personnalité insistante nous pousse à être meilleurs, à faire mieux et à avoir toujours plus.

L’autocritique, sévère, souvent injuste envers nous-même, nous fait réagir par peur de ses implacables coups de fouet… Nos idées sont alors rigides, souvent inconscientes, à propos de ce que nous devrions posséder pour réussir, paraître, etc. Et quelles attentes irréalisables plaquons-nous sur les autres ou le monde… comment nos enfants doivent réussir à l'école, comment le pays doit être dirigé, etc.

Que cette pression vienne de l'extérieur ou de l'intérieur de nous, elle active d'anciens circuits motivationnels qui utilisent les neurotransmetteurs et la dopamine. En un mot, la dopamine suit les résultats attendus (par exemple, les e-mails terminés, les objectifs de vente atteints). Si le résultat se produit réellement, la dopamine augmente, ce qui nous aide à nous sentir soulagés, tandis que d'autres systèmes de neurotransmetteurs, tels que les opioïdes naturels, nous procurent une sensation de plaisir. Mais voici le hic : sur le chemin du résultat souhaité, les niveaux de dopamine chutent, ce qui entraîne une sensation désagréable de stress, de malaise et de pression. En cas de retards, de barrages routiers, d’échec total… la dopamine chute, ce qui ressemble à une déception, une frustration, voire un désespoir. Pour éviter la douleur de la chute de dopamine, nous allons très vite vers nos objectifs, pris entre la volonté et le désir.

Ce système de dopamine, ainsi que les émotions et pensées (liées mais plus récentes et sophistiquées sur le plan de l'évolution), a été très efficace pour maintenir nos ancêtres en vie dans la nature. Mais au mieux, il y a des dommages collatéraux inhérents à être motivé par le résultat, l'urgence et la pression. Il réduit l'attention à un objectif particulier dans notre vision. Il est tendu, contracté et inconfortable et déclenche généralement le système de réponse au stress, dont l'activation chronique a de nombreuses conséquences négatives pour la santé et le bien-être à long terme. De nombreux objectifs ne sont tout simplement pas atteignables, voire totalement irréels, et nous nous sentons donc mal si nous sommes déterminés à les atteindre. Et même si nous obtenons le résultat souhaité, ses gratifications sont souvent moindres que promises, et dans tous les cas, elles finissent par s'estomper comme du sable qui glisse par entre les doigts de notre conscience.

Et au pire, les pressions internes et externes nous poussent à poursuivre des objectifs et des désirs qui sont mauvais, voire dévastateurs, pour nous et pour les autres. Nous en sommes là : essayer de respecter des normes irréalistes, nous comparer aux autres, avoir l'impression d'être à la traîne, mettre l'équilibre travail/vie privée en péril, chercher l'amour aux mauvais endroits, être dur avec nous-même ou les autres, nous pousser au-delà de nos limites et de nos capacités, et tôt ou tard fonctionner à vide.

Ouf. Assez ! Il comment relâcher la pression ?

Rappelle-toi que tu peux agir de manière plus compétente et efficace en l'absence de pression. Tu peux nourrir des aspirations saines, les laisser t’emporter avec détermination et passion, tout en restant fidèle à ta propre étoile, sans te fatiguer ni te stresser en cours de route. Tu peux faire preuve de prudence, aimer les autres, t’élever dans le travail que tu as choisi et améliorer ton environnement de façon puissante et joyeuse, sans avoir l'impression sans cesse d'avoir une cravache prête à te frapper dans le bas du dos.

Lorsque des choses t’arrivent (appels téléphoniques, désirs des autres, rythme effréné…) essaye de créer une sensation de tampon entre toi et elles, une sorte d'amortisseur, comme si tu les voyais à travers l’autre bout d'un télescope. Ralentis les choses, le temps d’un battement de cœur, d’un souffle, d’une journée… offre-toi du temps pour déterminer si c'est vraiment une priorité et quand tout cela doit vraiment être fait.

Écoute ton corps. Ressens-tu cette sensation d’obligation, de pression ? Écoute ton cœur comme un être sage et doux qui t'aime : qu'est-ce qu'il te dit ?

Écoute les « je devrais, je dois » murmurer ou crier dans ton esprit. Sont-ils vrais ? Viennent-ils vraiment de toi plutôt que d'un parent intériorisé ou une autre figure d'autorité ? Que se passerait-il si tu ralentissais un peu, si tu faisais une chose de moins chaque jour ? Probablement, personne d'autre que toi ne le remarquerait !

Sois plus aimable avec toi-même. Abaisse un peu tes normes, et tu pourras te permettre de te détendre un peu. Sois réaliste quant au temps que les choses prennent réellement et aux dérapages fréquents qui se présentent dans une vie. Essaye de ne pas prendre d'engagements difficiles, voire impossibles, à tenir. N’écris pas de chèques avec ta bouche que ton corps ne pourra pas encaisser.

Rappelle-toi que tu es une personne fondamentalement bonne. Si tu baisses la pression et si certaines choses se font plus lentement, voire pas du tout, ta valeur en tant que personne reste la même.

Reviens sans cesse à ces moments dans lesquels les choses vont généralement bien sans que ce ne soit « parfait ». Pas d’inquiétude face à l'imperfection, car elle se retrouve partout et est nécessaire à la bonne marche du monde. En ce moment, tu es probablement suffisamment en sécurité, suffisamment nourri et suffisamment aimé.

Respire amplement. Souris sans raison. Tu es en vie. Tu peux baisser la pression. Pscht…

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Pierre-Éric BAIBAY, traduit et librement inspiré d’un article de Rick Hanson : Just One Thing - Simple practices for resilient happiness « Is it truly urgent? The Practice: Lower the Pressure »

Novembre 2022